Laurent Binet dans On n'est pas couché
Dans On n'est pas couché, Yann Moix l'accuse de ternir l'image des grand penseurs français du XXe siècle, comme si le roman devait être un exercice de révérence. Comme si, depuis madame Bovary et l'accusation d'immoralité, rien n'avait vraiment changé.
Pour ma part, j'admire la verve, l'humour, le savoir-faire de l'écrivain. Je ne suis pas choquée par le fait que Laurent Binet représente Foucault dans un back room. Je trouve néanmoins que dès les premières pages, le livre échoue a retenir l'intérêt du lecteur. On est témoin de la virtuosité de l'auteur sans se sentir jamais concerné par ce qu'il raconte, sans avoir l'impression que lui-même y accorde de l'importance.
"C'est brillant, mais ça manque de pauvreté" aurait écrit Mozart en marge d'un de ses propres concertos, en vue le retravailler.
C'est brillant, mais ça manque de sincérité, aurais-je envie d'écrire au sujet de la septième fonction du langage. HHhH, le précédent roman de Laurent Binet retraçait la fascination du narrateur pour Reinhardt Heydrich. Quelque chose d'essentiel, d'authentique, de non fabriqué se jouait là, dans le duel entre le narrateur et ce personnage maléfique, dans la lutte entre l'auteur et son texte, qui faisait vibre le roman et le lecteur.
Rien de tout cela dans la Septième fonction du langage. L'auteur cabriole et cabotine sans croire jamais à ce qu'il raconte, et malgré la virtuosité du roman, le lecteur s'ennuie. Pour ma part, avec toute l'admiration que j'ai pour lui, j'aurais envie de rappeler à Laurent Binent que la première fonction de l'écrivain n'est pas d'occuper l'espace médiatique, mais d'écrire sans tricher sur ce que lui seul est capable d'exprimer.