À Paumée
Paumée, mon très cher ami -
très cher, point n'est mensonge -
pas de toi je ne me plains.
Sottement je me navre
devant ta déchéance,
Paumée, mon beau doux ami,
mais sais bien que tu ne peux
être plus que je te fais.
Non de toi je ne me plains.
Ami, te dois excuses
de nous désirer autres.
Paumée, mon cher doux ami,
ce n'est de toi que me plains.
Je me souviens d'une petite histoire que j'ai racontée, histoire de Benoît qui avait longues errances derrière lui... avait lassitude grande... était parvenu à l'âge grand., qui s'est trouvé une maison, presque une cabane, aux lisières d'un bourg, juste au dessus, légèrement, en surplomb de la route de clôture ou de contournement, et des toits des maisons.
«Il avait envisagé, vaguement, ou décidé, mais sans le désirer réellement, d'occuper les années qui s'étendaient encore devant lui à écrire quelque chose qui aurait pu être ses mémoires ou - l'idée lui plaisait, avec tout de même un peu d'auto-ironie - son livre de sagesse. Il ne l'a pas pu, ou pas tout de suite. Il a laissé le temps en venir. Et chaque matin il sortait sous sa tonnelle clairsemée et il regardait. Les toits étaient gris, doucement roses quand le soleil s'en venait, les arbres étaient petits, et grands dans son esprit, la connaissance qu'il en avait, et le plateau s'étendait, avec des bosquets, de petites bosses, quelques fermes, jusqu'à la chaîne de montagnes bleutées, sur une distance qui variait selon les jours, les heures, les lumières. Il restait là. Il ne pensait pas»
Je n'ai pas voyagé,
et mon antre n'a d'autre vue qu'un mur où je vois des pierres ou le monde,
ou la mer, ou rien.
Je reste devant lui
et je ne pense pas.
Et comme Benoît ne le fait pas
- parce qu'il veut trop, et renonce trop -,
et comme beaucoup de Jean, Pierre, Jeanne, Marie,
qui replient leur vie,
j'ai imité les blogs,
leurs gentils journaux.
Je n'avais point de mémoires à écrire,
mais du vide, des réminiscences plus ou moins transformées,
des cris à ne pas exprimer et
un peu d'imagination bien trop désordonnée pour tout autre.
Seulement je suis têtue,
et en besoin de distraction,
et de règles.
Un jour j'ai décidé, Paumée mon cher, d'avoir rendez-vous régulier avec toi.
Paumée, attend.
Après, peu à peu, j'ai découvert blogs ou sites
en écrits,
intelligence ou belle langue,
ou les deux -
et j'ai souvent compris,
ou cru comprendre,
et me suis invitée.
Mais j'ai garde d'oublier :
«auteur» je ne suis, j'occupe mon temps gagné.
mon rôle est de déguster,
ou non, mais alors en silence,
et c'est très bien.
Non Paumée, cher doux ami, je ne t'insulte point,
ne grimace pas comme ça,
tu sais comme je suis,
je m'impatiente parfois de ce que
nous sommes,
mais, obstinément, nous demeurons.
Brigitte Célerier, http://brigetoun.blogspot.com/
Et d’autres vases communicants ce mois :
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Mathilde Roux et Anne-Charlotte Chéron
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Antonio A. Casili et Gaby David
Michel Brosseau et Christine Jeanney
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