Dans un ouvrage peu connu intitulé La Petite amie imaginaire, John Irving revient sur son parcours, ce qui l'a construit en tant qu'écrivain, ce que la vie lui a appris, ce qu'il comprend rétrospectivement et nous fait profiter de son expérience.
Le livre comporte un intéressant parallèle entre son apprentissage de la lutte, comme discipline sportive et sa formation en tant qu'écrivain. Incongru ? Pas autant qu'on pourrait le croire... Irving fait toute une carrière comme lutteur, puis comme entraîneur, dans le même temps qu'il apprend à écrire et se met à animer des cours de creative writing...
Le secret lui est révélé d'emblée par son premier entraîneur : "Ted Seabrook ne se contenta pas de m'enseigner la lutte : il me prévint d'avance que je ne serais jamais mieux que 'tout juste passable' à cause de mes performances athlétiques limitées. Mais il me persuada aussi que je pourrais compenser ce handicap, cette absence de capacités évidentes, à condition de me donner à fond, de m'appliquer à apprendre.
Les dons, les dons -disait-il- on en fait toute une histoire. Tu n'es pas spécialement doué, et après ? Ca n'est pas une raison pour laisser tomber.
"Le concept s'appliquait très bien à l'écriture de fiction, et d'ailleurs à toutes mes études. (...) Et puis surtout, je réécrivais tout. Parce que le premier jet, c'est comme la première fois qu'on essaye une projection. Il faut s'y exercer tant et plus avant de pouvoir envisager même de la tenter dans un match. Je commençais à prendre au sérieux mon absence de dons."
Plus tard, l'adaptation de son roman l'Oeuvre de Dieu, la part du Diable vaudra tout de même un oscar à ce romancier peu doué...
Irving raconte aussi avoir été à maintes reprises humilié par son professeur d'écriture créative, Nelson Algren, qui ne l'appréciait pas. Il n'en conserve semble-t-il aucune rancune : "Mr Algren ne m'a pas fait de tort, malgré ses commentaires acides et selon moi, injustes (...) ; il faut que les vrais auteurs s'habituent à être incompris."
Il avoue même avoir été contraint, à cause de sa dyslexie et de ses résultats médiocres, à redoubler sa cinquième année d'université.
"Cela n'a plus guère d'importance aujourd'hui. Et j'y vois une excellente leçon pour le romancier : il faut avancer, évoluer - mais à son rythme. Finir ses études, finir son livre, on a toujours le temps."
Encourageant, non ?
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