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Avez-vous conscience d'avoir révolutionné le cinéma ? demande Thierry Ardisson à Jean-Luc Godard, dans son émission Rive Droite Rive Gauche.


Jean-Luc Godard passe une main hésitante sur son menton mal rasé, puis dans ses cheveux blancs hirsutes. Derrière ses lunettes démodées, à grosse monture rectangulaire, derrière les verres épais, ses yeux semblent minuscules.

Non, vraiment... non, je ne crois pas... dit-il d'une voix traînante, comme intimidé.


Je vous assure, insiste Thierry Ardisson, sourire, charme, assurance et dents blanches. Des films comme Pierrot le Fou ont changé le regard de tous ceux qui les ont vus. Moi, par exemple, cela a modifié ma façon de voir le cinéma, et même, tout simplement, ma façon de voir. 


Le  regard de Godard devient évasif, sa voix de plus en plus traînante. Il penche un peu la tête.


Je ne crois pas que... mes films... aient changé quoi que ce soit, dit-il doucement, en cherchant ses mots.


Et il semble que ce soient des signes touchants d'humilité, cette voix mal assurée, cette hésitation. Elles dessinent la figure du grand homme resté modeste malgré l'immensité de l'œuvre accomplie. Il semble qu'il faille lui arracher les mots de la bouche, au génie timide, peu au fait des usages sociaux et mal habillé. En tout cas, Ardisson l'interprète ainsi. Pourtant, commence-t-il...

Mais Godart  achève sa pensée. Et si son phrasé demeure hésitant, maladroit, maintenant, derrière les verres épais, son œil brille.


Non... dit-il à regret en regardant Ardisson, mes films n'ont rien changé... Sinon... vous ne feriez pas des émissions comme celle-ci. 

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